Toutes les cartes Spécial
Fin 2021, l’Echo recevait une proposition de reportage intitulée «La guerre oubliée du Donbass». Le Donbass? Avant l’invasion de la Russie, le 24 février, qui aurait pu pointer sur une carte cette région de l’est de l’Ukraine désormais au cœur de l’attention? Les combats meurtrissent pourtant depuis sept longues années l’oblast à tendance russophile de Donetsk autoproclamé république en 2014 avec l’aide du Kremlin. A l’instar de Louhansk où se trouve Severodonetsk, ville actuellement pilonnée par les forces russes.
Pourquoi cet oubli? Parce que, selon un effet d’entraînement bien connu, les journalistes tendent à aborder les mêmes sujets en même temps. Et à les oublier une fois la mode passée. En 2019, les projecteurs se sont ainsi tournés vers le Premier ministre Abiy Ahmed: ce jeune dirigeant au profil de réformateur éclairé recevait le prix Nobel de la paix pour avoir stoppé le conflit entre son pays, l’Ethiopie, et l’Erythrée. Mais depuis que le chef d’Etat s’est mué en chien de guerre, appelant les siens à «faire la peau» aux Tigréens du nord, son pays et lui intéressent moins.
N’oublions pas les autres guerres et crises.
Le pape et Caritas Suisse nous demandent de ne pas oublier les autres crises qui ensanglantent le monde. Ecoutons-les! En proie aux attaques djihadistes, le Sahel – vaste région semi-aride séparant le désert du Sahara au nord et les savanes tropicales au sud – devient, dans l’indifférence générale, la plus grande poche de pauvreté du monde. Quant au Yémen, les bombes, la diphtérie et la bataille pour l’eau y ont déjà fait près d’un demi-million de morts et huit fois plus de déplacés. A l’image de cette guerre complexe, celles du 21e siècle deviennent de plus en plus difficiles à décrypter. Pour y arriver et garder une vision d’ensemble, les médias ne doivent pas se laisser entraîner par l’air du temps. Et sortir du cercle vicieux de l’information qui tourne en boucle.
Pour en revenir au Donbass, sachez que l’Echo a publié le reportage en question dans le premier numéro de l’année (EM du 6 janvier) – cinquante jours avant le début de l’invasion russe. Avec une carte situant la ligne de front de cette guerre alors oubliée.
Articles en relation

Ukraine: il faudra bien faire la paix
Depuis l’invasion russe de l’Ukraine, la voix des pacifistes est presque inaudible en Suisse. Des bords du Léman à La Chaux-de-Fonds, chrétiens de gauche, mennonites et quakers remettent pourtant en question l’idée qu’une aide militaire massive à Kiev ramènerait la paix à l’est de l’Europe.

L’odeur de la poudre
«Je suis très préoccupé par le climat guerrier qui règne actuellement un peu partout dans le monde, y compris en Suisse. On a l’impression que certains acteurs, même d’anciens pacifistes, sont comme emportés par l’ivresse de la guerre.» Cette déclaration du conseiller fédéral Alain Berset, le 4 mars, accusé de reprendre «le narratif russe» et critiqué par son propre camp socialiste, a fait mouche dans les milieux suisses opposés à la guerre.

Solidarité: des Ukrainiennes au Jura
Un an après avoir amené deux Ukrainiennes et leurs enfants dans le Jura, Richard Crevoiserat et sa famille continuent de les entourer comme ils l’avaient promis. Les petits ont grandi, la famille a trouvé ses marques. Leurs permis S viennent d’être renouvelés, car la guerre continue.