«L’intelligence artificielle (IA) peut remplacer les journalistes»: ce n’est ni un milliardaire américain chantre des nouvelles technologies qui l’a annoncé ni un chef d’Etat rêvant d’en finir avec une presse trop critique, mais le patron de l’empire médiatique allemand Axel Springer – 18’000 employés dans le monde, dont 3400 journalistes. Le 28 février, Mathias Döpfner, également impliqué en Suisse par la joint-venture Ringier Axel Springer (groupe Blick et L’illustré notamment) a expliqué que des suppressions d’emplois chez le tabloïd Bild et le généraliste Die Welt auraient lieu prochainement, car l’IA peut «se charger de la mise en page, de la correction et de l’administration». Et même de la création «automatisée» de certains articles définis comme des «sous-produits» (résultats sportifs, bilans d’entreprise, etc.). Ainsi, assure Mathias Döpfner, la branche pourra se concentrer sur les «reportages, scoops et éditoriaux».
Bon pour la presse?
De quoi satisfaire les journalistes et photographes de presse qui depuis longtemps réclament davantage de temps et de moyens pour se rendre sur le terrain afin de cerner les préoccupations des citoyens et les phénomènes de société? Une partie de la profession en doute, en particulier lorsque l’idée est soutenue par des entreprises comme TX Group (anciennement Tamedia) dont les restructurations à répétition ont conduit à saigner les rédactions de nombreux titres romands. Et dont les activités les plus rentables, non liées au travail rédactionnel, ne soutiennent pas ou peu les journaux en difficulté. «L’IA va révolutionner le journalisme et l’industrie des médias en soutenant – ou remplaçant – le journalisme», affirme Mathias Döpfner. Soutenir ou remplacer, là est la question.